A 29 ans, Adèle Robert franchit une nouvelle étape dans sa carrière d’arbitre. Ancienne joueuse à Soignies, elle n’a cessé de progresser au sifflet au point donc, aujourd’hui, d’être choisie par World Rugby pour assurer la touche lors des rencontres Angleterre-Ecosse (25 mars) et Ecosse-Italie (22 avril).

Un niveau qu’elle n’aurait jamais pensé atteindre à ses débuts dans l’arbitrage. "Comme je le répète souvent, j’ai commencé un peu par hasard. Yves Calomme, qui était alors président de Soignies, a vu qu’une formation réservée aux filles était organisée et me l’a proposée", se rappelle Adèle. "Je me suis dit que cela pouvait aussi m’aider dans mon métier d’éducatrice physique et j’y suis allée par curiosité. La formation m’a plu. J’ai fait 1 ou 2 matchs et cela m’a plu. Mais je n’avais aucune vision de comment évoluer dans l’arbitrage, ça s’est fait étape par étape".

Et cette nouvelle étape, la cheffe de file de l’arbitrage belge féminin l’a atteinte grâce au travail fourni ces dernières années mais aussi à un petit lobbying effectué notamment par la Commission des Arbitres, Philippe Lenne et Johnny Meersman en tête. "On a accéléré les choses pour qu’Adèle trouve sa place au niveau européen, où elle est déjà très présente à Rugby Europe. Car elle est totalement prête par rapport à sa carrière. Elle a le niveau de maturité nécessaire pour prendre cette étape de sa carrière. C’est vraiment le bon moment, toutes les étoiles étaient alignées", souligne Philippe Lenne, responsable de la Commission des Arbitres. "Il faut aussi du lobbying car la concurrence est bien présente. Il a plein d’autres filles qui étaient candidates pour intégrer le 6 Nations. Et si tu ne te fais pas connaître, personne ne va venir te chercher".

De plus en plus demandée sur la scène internationale, Adèle Robert va vivre un printemps chargé. Elle ne passera ainsi pratiquement qu’une soirée en Belgique entre le 15 mars et le 2 avril et participera d’ailleurs à une semaine de stage en Angleterre en mars pour préparer le tournoi. D’ici là, elle redouble déjà d’efforts. "L’annonce de World Rugby a mis un coup de boost à mes entraînements physiques, même si je m’entraînais déjà beaucoup. Là pour le moment, je m’entraîne deux fois par jour. J’ai un préparateur physique. Je fais encore plus attention à mon hygiène de vie".

D’autant que cette nomination dans le 6 Nations en appelle d’autres. "Il faut savoir qu’Adèle n’est pas uniquement retenue pour faire la touche sur deux matchs, elle est surtout prise dans le groupe de développement de World Rugby Women Elite. World Rugby reconstruit en effet un nouveau groupe pour assurer les 3, 4, 5 années à venir", souligne Philippe Lenne.

Après le 6 Nations, quelle serait la prochaine étape dans le viseur ? "Ici c’est déjà une fameuse étape à faire correctement. Je ne réfléchis pas trop à la suite", précise Adèle Robert. "C’est toujours un rêve d’être au centre sur des matchs du VI Nations mais si ça reste à la touche, ce sera déjà génial. Mais les prochaines compétitions, ce serait faire le 6 Nations au centre, la Coupe du Monde…".

Des objectifs qui sont tout sauf utopiques. "En espérant que tout se passe bien, et on n’en doute pas, Adèle est repartie sur un cycle de plusieurs années pour arbitrer au centre, avec plusieurs échéances notamment en octobre, à plusieurs niveaux. Si cela se passe bien, elle sera donc reprise au centre pour des matchs World Rugby. Et pour la suite, on peut vraiment rêver. Tout est possible", se réjouit Philippe Lenne.

Assurant un rôle d’exemple, Adèle Robert ouvre peut-être la voie à d’autres (futures) arbitres. "Il y a une grande opportunité chez les femmes. La double carrière jeu-arbitrage est toutefois impossible. Mais si des filles veulent maintenant s’exprimer et prendre le sifflet, on peut leur montrer cette opportunité. Nous sommes beaucoup plus crédibles : on ne vend pas du rêve, on vend de la réalité", explique Philippe Lenne. "On a tous espoir que des filles qui jouent se disent : ’on peut aussi arriver là’".

Du côté de la fédération, on se réjouit bien sûr aussi de la réussite d’Adèle Robert. "C’est une immense fierté et une immense joie par rapport au travail effectué par Adèle depuis plusieurs années", réagit Nathalie Van Laeken, Secrétaire Générale de Belgium Rugby. "Un immense merci à l’ensemble de la Commission des Arbitres pour son soutien. C’est bien sûr la récompense d’un travail personnel mais aussi d’un travail collectif. C’est par ailleurs une immense fierté en tant que Secrétaire Générale de voir que c’est une femme qui arrive à un niveau aussi élevé, ce qui n’est jamais arrivé dans le passé. Cela montre deux choses : que le travail paye et que l’arbitrage mène aussi à l’international. J’espère qu’Adèle sera une figure inspirante pour des jeunes joueuses et les jeunes arbitres. Il reste à lui souhaiter de passer un super moment".

On peut compter sur Adèle pour ça. "Je ne suis pas une grande stressée à la base. Je ressens tout de même toujours un peu de stress avant quelque chose que tu ne connais pas. Le matin d’un match, je suis toujours un peu stressée en me levant. Mais c’est du stress positif, pas celui qui t’empêche de manger le matin. Mais c’est sûr qu’au moment d’entendre les hymnes lors du match Angleterre-Ecosse, ça va me faire quelque chose, mais c’est plus de l’enthousiasme et de l’excitation".