ROUMANIE - FRANCE, 11 novembre 1962

A l’ occasion du match BELGIQUE-ROUMANIE de ce samedi 9 mars, je vais vous relater une anecdote vraie d’un certain Roumanie-France joué à Bucarest le 11 novembre 1962 et dirigé par un arbitre belge.

C’est évidemment un temps que les moins de 60 ans ne peuvent pas connaître....

A l’époque, pas de Tournoi des 5 ou 6 Nations mais des matchs amicaux (?) entre nations. La Roumanie alors faisait partie de l’élite du Rugby européen.
En FRANCE, c’était l’époque des Razat, Arino, des frères Boniface, Laborde, Camberabero, Lacroix, Gensame, Romero, Crauste, Momejat, Lira, Mas , Laudouar, Domenech.

Un an avant, j’entrais dans la grande famille du Rugby. C’est toute une époque, ....mon époque !

Cette histoire est un hommage à M. Teddy Lacroix, grand serviteur du Rugby belge.

JEAN HEIRWEGH

* * * * * *

Bucarest, 11 novembre 1962. Face à la Roumanie, les affaires de la France, qui sera finalement battue 3-0, vont mal. A dix minutes de la fin, pourtant, l’arbitre, un Belge nommé Lacroix (NDLR : il s’agit de feu Teddy Lacroix ayant été, entre autre, Président de la Fédération Belge de Rugby) qui ne comprend que le Français, siffle un coup franc contre la Roumanie, à cinquante mètres des poteaux. Le Roumain ne comprend pas et demande, dans sa langue, des explications à l’arbitre, qui, évidemment, comprend encore moins.

Alors, Amédée Domenech (NDLR : de Brive) s’approche. Pendant toute la partie, M. Lacroix a eu affaire avec Amédée, qu’il croit polyglotte, parce que le bougre s’est arrangé pour lui faire croire qu’il parlait plusieurs langues. Et monsieur Lacroix admire beaucoup Domenech.

Amédée, donc, s’approche, écoute le Roumain, fait semblant de le comprendre et lui dit, avec indignation :

- Tu n’as pas honte, petit voyou, d’engueuler l’arbitre ?

- Qu’est-ce qu’il dit ? Demande M. Lacroix.

- Des gros mots. Des insanités. Des grossièretés que je n’ose pas vous répéter, répond Amédée rougissant.

- Ah bon, dit l’arbitre.
Et il fait reculer les Roumains de dix mètres. Les poteaux ne sont plus qu’à quarante mètres et Guy Camberabero (NDLR : de La Voulte) se prépare.
Mais le Roumain, qui ne comprend décidément pas, demande à nouveau des explications. Il élève la voix, fait des gestes.

- Ça alors, renchérit Amédée. Quel culot. Je n’ai jamais vu un personnage aussi grossier sur un terrain !

- Il dit encore des cochonneries ? S’enquiert M. Lacroix.

- Oh la la ! Pire que tout. C’est pas croyable, un type pareil.

- Bon. Alors dix mètres de mieux.
Et M. Lacroix fait reculer encore les Roumains, de plus en plus décontenancés.

- Du regard, Amédée interroge Guy Camberabero. Faut-il se rapprocher davantage ? Ou bien, est-ce que ça va comme ça ?
Très bien, dit Guy en posant son ballon. Mais Guy Camberabero ratera son coup de pied et la morale était sauve.

La Roumanie, finalement, ne sera pas rejointe et preuve sera faite qu’en Rugby, le crime ne paie pas toujours.
(extrait de « Sacrées Bourriques » de Paul KATZ.)