Arbitre à la Fédération française de rugby depuis 2001, Salem Attalah dispute actuellement sa dernière année d’arbitrage. Habitué des pelouses du Top 14, il était de passage à Bruxelles ce samedi 18 février. En matinée, il a ainsi participé à une formation d’arbitres à Boitsfort, échangeant avec les arbitres présents. Et l’après-midi, Salem Attalah a donc dirigé la rencontre du VI Nations B entre la Belgique et la Russie, perdue par les Diables Noirs (18-25).

Est-ce plus facile d’arbitrer en Top 14 ou en VI Nations B ? "L’arbitre doit s’adapter. La difficulté du Top 14 c’est la vitesse d’exécution. On a beau voir au ralenti, tout le monde a son avis, sauf que l’arbitre lui n’arbitre pas au ralenti", nous a expliqué Salem Attalah après la rencontre au Petit Heysel. "Ici c’est vrai que la vitesse était moindre mais j’ai préparé le match comme un match du Top 14 et je ne suis pas tombé dans le piège de l’arbitre qui va se dire ’j’arrive du Top 14 et je vais tout maîtriser’. Pas du tout, je n’ai jamais préparé un match comme cela. Jusqu’à mon dernier match de cette saison, je préparerai mes matchs avec le même sérieux. Je m’en voudrais si jamais un jour j’arrive en me disant ’c’est moi le big boss, et les joueurs vont se mettre à mon niveau’. L’arbitre doit s’adapter à ce qu’il se passe sur le terrain et se mettre à disposition du jeu. Franchement ici à Bruxelles, j’ai vu deux belles équipes, qui ont été hyper positives dans leur comportement, dans l’envie de jouer. Donc moi je les ai laissées faire, je les ai accompagnées. On dit qu’un bon arbitre doit être invisible, j’espère donc avoir été invisible".

"Quand il n’y a pas d’argent, tout le monde s’aime. Mettez de l’argent sur la table et les problèmes arrivent"

Le message transmis par Salem Attalah lors de la formation des arbitres belges a impressionné. "J’adore la formation. J’adore accompagner les autres. Je crois que la plus belle des choses c’est donner, partager. Surtout, le piège de la formation, c’est être donneur de leçons. Je fais référence à une situation qui dit ’l’important n’est pas de faire comprendre, de faire admettre, mais l’important est de faire réfléchir’. Et ma devise est celle-ci. Si je pars d’une réunion et que les jeunes se disent ’après tout, il nous a fait rélféchir sur ça, il nous a donné une piste sur ça’, alors moi j’ai gagné", souligne Salem Attalah.

Fort de ses années d’expérience en qualité d’arbitre, Salem Attalah est bien placé pour poser un regard sur l’évolution du rugby. Il tire ainsi la sonnette d’alarme. "Ce qui a beaucoup changé, c’est l’apport de l’argent. C’est comme dans les bonnes familles, quand il n’y a pas d’argent, tout le monde s’aime. Mettez de l’argent sur la table et les problèmes arrivent. Il y a quelques années encore, on se moquait un peu du comportement des footballeurs mais je dis attention. Attention à l’héritage que l’on va laisser à nos futurs jeunes joueurs, à nos futurs jeunes arbitres. Pour moi, la différence par rapport à un sport où le ballon est moins ovale, c’est le respect de l’arbitre. Tant que l’on aura un petit arbitre, petit physiquement mais grand par le talent, qui appellera un joueur de 2 mètres et que ce joueur baissera la tête et repartira, nous pourrons être fiers de notre sport".

"Par contre les comportements changent. J’espère que tout le monde va quand même au-delà de l’intérêt personnel en pensant à l’intérêt général. On aime notre rugby, on est passionné, on aime notre nation, on aime la victoire, mais après tout ce n’est qu’un jeu. Et c’est juste une excuse pour que tous on se croise et qu’on échange. Et heureusement on n’est pas toujours d’accord sur tout, c’est ce qui fait justement la beauté des rencontres et du sport".


(Photo Sportkipik.be)